
Dégustation du 6 février 2019
« Les Olympiades »
Organisée par Isabelle Brault
Isabelle nous a conviés à déguster une
sélection de ses vins « chéris » de partout
à travers le Monde, présentés comme participants
à des olympiades. Seule l’Asie n’y était pas
représentée, malgré la présence d’un
vin du Proche-Orient.
Le déroulement de la dégustation ne comptait pas vraiment
de volées. Nous avons eu droit à dix vins de pays
différents (sauf une exception) servis quelques un à la
fois, en double aveugle.
On débute, comme souvent, avec des bulles : le Blanc de blancs
NV Brut (VQA Niagara Escarpment) de Cave
Spring (100 % chardonnay). Il est jaune pâle très
brillant, avec une belle mousse, pas très aromatique, floral,
fruité (pomme verte, agrumes) et un peu bonbon (gomme balloune).
C’est en bouche qu’il se révèle; il est vif,
bien fruité, très sec, calcaire, légèrement
brioché et équilibré. La finale est juteuse et
très fruitée. Un vin pas très complexe, mais
délicieux. Il s’est classé en quatrième
place, à côté d’un vin américain.
Comme deuxième compétiteur, un premier
représentant de l’Europe, l’Herakles GRK 2013 de Madirazza,
originaire de la côte dalmatienne, en Croatie. Le grk est un
cépage blanc indigène. Le vin est jaune doré, bien
ouvert aromatiquement, fruité (poire, pomme, citron), avec de la
cire et du caramel. En bouche, il n’est pas très gras, il
est légèrement fermentaire, avec un fruité bonbon (life savers),
légèrement muscaté et son acidité
élevée donne un équilibre approximatif. La finale
est un peu pointue et amère (grk signifie amère)
Troisième concurrent, le vin américain qui partage la
quatrième place avec le Cave Spring, le Pinot Noir 2015 (AVA
Dundee Hills) du Domaine Drouhin,
en Oregon. Il est assez pâle et la teinte est jeune. Le nez est
bien ouvert, fruité, légèrement fumé et un
peu boisé. Le vin est corsé tout en restant
délicat, les tannins sont faciles, le fruité (fraise,
griotte) est éclatant, un peu sucré et
l’équilibre est bon. La fin de bouche est fruitée,
un peu sucrée, légèrement animale, avec une note
chocolat et une certaine chaleur (14,1 %/vol) et elle est très,
très persistante.
A suivi le représentant du Moyen-Orient, le Hochar Père
et Fils 2000 du Château Musar,
au Liban, fait de cinsault, de cabernet sauvignon, de carignan et
d’un peu de grenache et élevé neuf mois en
chêne français. La robe est pâle et la couronne
tuilée. Le nez est intense, légèrement
oxydé, un peu alcooleux, avec un boisé vanillé qui
ressemble à celui des vins de la Rioja espagnole, du fruit
(pruneau, cerise, olive) et du goudron. En bouche, il est gras, soyeux,
peu fruité, bien boisé, avec des tannins fondus et un
équilibre irréprochable; la finale est boisée,
épicée et il est très, très long. Un vin
tout en élégance et en finesse, aromatiquement
très semblable à son grand frère le Château
Musar.
Ensuite, on revient en Europe et c’est au tour de la France,
représentée par le Clos
de l’Oratoire 2004 (AOC Saint-Émilion Grand Cru,
Classé) des Vignobles Comtes von Niepperg. C’est un
assemblage de merlot (80 %) et de cabernet franc qui a fait 18 mois de
barrique. Il est grenat assez foncé et montre un peu
d’évolution. Il est bien ouvert, fruité (pas assez
au goût de certains), épicé (poivre), avec des
notes tertiaires (tabac); un nez complexe, racoleur pour certains,
extraordinaire pour d’autres. En bouche, il est gras sans
être très puissant, avec des tannins bien présents,
mais assez fondus, un fruité discret, un peu d’alcool, un
boisé épicé et du noyau de cerise. Il finit
très sec, sur le bois, le menthol et la torréfaction
(café), avec une bonne persistance.
Le suivant est un vin australien, le Cabernet Sauvignon 2002 (Margaret
River, South West Australia) de Cape
Mentele (Groupe LVMH). Le vin est opaque, très
aromatique, terreux (ciment pour certains), fruité,
végétal (poivron vert) et sanguin. Le corps est moyen,
les tannins assez accessibles, il est bien sec, très
fruité et la note végétale revient;
l’équilibre est impeccable. La finale terreuse lui donne
des airs de cabernet franc et il est vraiment très persistant.
Il a pris la sixième place, ex aequo avec un vin italien.
On revient à nouveau en Europe, avec un concurrent
espagnol, le Condado de Haza
2007 (DO Ribera del Duero) d’Alejandro Fernández.
Même teinte, mais moins foncé que le Cape Mentele, ce 100
% tempranillo est bien expressif, avec un beau boisé, du
café, un peu d’épices, de fumée et de
graphite. Il est corsé, puissant, mais ses tannins sont soyeux,
son fruité discret et évolué et son
équilibre impeccable, malgré une légère
chaleur. La persistance aromatique est excellente. Superbe
maturité! Le vin de la soirée, à
l’unanimité.
Huitième vin, du Portugal voisin, le Vinha Grande 2016 (DOC
Douro) de Casa Ferreirinha
(Vinhos Sogrape), un assemblage de touriga franca (50 %), de touriga
nacional (35 %), de tinta roriz (10 %) et de tinta cão (5 %). Il
est rubis opaque, violacé, très jeune. Le nez est
très ouvert, végétal (style bordeaux), très
fruité (bleuets, mûres) et un peu médicamenteux. Il
est très corsé, gras, riche (costaud), très
fruité (surmaturité?), avec des tannins enrobés,
du bois et de la chaleur. La finale est assez sèche, avec des
fruits cuits et elle est très longue.
L’avant-dernier participant est un vin italien, le Costasera 2013 (DOCG Amarone della
Valpolicella) de Masi. Il a remplacé un membre vedette de son
équipe, le Mazzano 2009 (même DOCG, même producteur)
qui a dû déclarer forfait pour cause de « maladie
». À l’œil, le Costasera est assez
foncé et légèrement évolué. Le nez
est moyen, très torréfié (café espresso),
boisé et très épicé, avec une note animale.
Le corps est moyen, les tannins bien présents, mais quand
même soyeux et l’équilibre est parfait; on
détecte également des notes tertiaires
d’évolution en bouche. La fin de bouche est
légèrement chauffée et médicamenteuse
(mélasse), très fruitée et interminable. Il a
partagé la sixième position avec le Cape Mentele.
Et le dernier concurrent, un piémontais, deuxième
représentant pour l’Italie : le Gattinara 2013 (DOCG Gattinara) de
Travaglini, fait exclusivement de spanna (nebbiolo). Il est assez clair
et, comme la plupart des vins de nebbiolo, même en jeunesse,
orangé sur la couronne. Le nez est moyen, pour ne pas dire
discret et assez peu défini. La bouche est surprenante,
très fine pour un jeune nebbiolo, pas très corsée,
avec des tannins fins, une belle acidité et un très bon
équilibre. La finale est très, très sèche
et fait saliver. Un vin de bouffe.
Finalement, ce sont trois vins européens qui sont montés
sur le podium. Le bronze a été remporté, pour la
France, par le Clos de
l’Oratoire, l’argent est allé à
l’Italie, grâce au Gattinara
et c’est le Condado de Haza 2007
qui a remporté l’or, pour l’Espagne. Un podium assez
surprenant, surtout pour le jeune Gattinara qui aurait dû
être beaucoup plus austère; pour les autres, le
millésime a sûrement compté pour beaucoup dans la
performance.
Un tour du monde bien organisé, à l’aide
d’une belle variété de très bons vins, tous
bien représentatifs de leur lieu d’origine. Merci Isabelle.
Alain
Brault
Académie
du vin de
l'Outaouais